Il faut croquer Rhuys comme l’on débute une journée. De bon matin, par le petit déjeuner. Oh, nul besoin de s’enfoncer bien loin dans la presqu’île, le bonheur est caché à Saint-Armel, derrière les volets clos du Moulin à Café d’Eric Le Joubioux et Yann Saintilan. Et à 7h30, il manque encore de longues minutes pour que le bonheur atteigne la plénitude… de sa cuisson. Ah oui, ce bonheur matinal a pour nom, Gochtial, à mi-chemin d’une brioche bien serrée et d’un pain légèrement sucré. 8h05, les premiers parfums s’échappent du four Brochet 1911 à gueules de lions et briques réfractaires. Yves, le boulanger aux mains farineuses, n’en dira pas plus sur la recette, gardée secrète… A savourer nature, sans attendre, et puis, plus tard, enrichi du beurre demi-sel de la ferme de Suscinio de Gurvan et Isabelle Bourvellec.
Un goût unique que l’on retrouve d’ailleurs dans cette tome de Rhuys à croûte cironée, produite à la ferme avec le lait cru de pies noires, normandes et montbéliardes. Un tronche de montagnard à la mer qui ne fait pas semblant, ce Gurvan. Isabelle est de la même trempe et si elle doit claquer le cul d’une pie noire récalcitrante lors des traites en public, elle n’hésite pas un instant. Il y a du caractère dans cette ferme où les vaches rustiques se contentent d’une terre peu arable en bord de mer. « Et je vous le dis tout de suite, le goût iodé c’est bon pour les romans ! » Non, cette pâte mi-cuite salée à sec, idéale à 3 mois, a un goût laitier lorsqu’elle se met à température de la langue. C’est là que le palais déguste…
Puis, continuer à se perdre dans cette presqu’île peuplée de haies et de petites parcelles. C’est bon signe, comme les ruches croisées au Logeo et sur l’île de Govéan. Elles appartiennent à Laurence et Thierry Plagué de la Sellerie Nautique qui perpétuent ici une vieille tradition familiale comme le confie Laurence. « Le rucher se transmet d’une génération à l’autre. Aujourd’hui c’est mon mari qui en est l’héritier. Ici les abeilles se plaisent et nous donnent un miel marqué par les fleurs de roncier, les mûres… Le goût reste assez typé. » Petite originalité, ce miel est parfois vendu en libre service ! « C’est une production familiale, mais lorsque la récolte est abondante, nous mettons des pots de miel dans une boite en face de l’entreprise. Jusqu’à aujourd’hui, il n’y a jamais eu de soucis, les gourmands mettent les 5 € et prennent un pot de 500 g. » Ca se passe comme ça sur Rhuys…
Plus loin, au détour d’un croisement, un panneau : Ti ferm. Celle de Bellevue, en élevage bio depuis 25 ans. On y croise de la normande, de la holstein croisée pie noire, de la holstein tout court broutant à deux brins d’herbes d’un champ fleuri de blé noir en cette fin d’été. Avec son accent italien, Mikele fait la liste des fromages vendus sur le marché de Sarzeau ou dans ce magasin de producteurs bien nommé, Court Circuit. « On a des pâtes molles type Saint-Nectaire, des frais plus lactiques et même des fromages ricotta ! » Italien on vous dit… Justement, à propos de marchés, cette presqu’île en est garnis toute l’année ! Sarzeau le jeudi et le samedi donc, Saint-Gildas le vendredi et le dimanche, Arzon le mardi… A un angle, ce jeudi là, un étal entièrement recouvert de dorades royales. L’étal de l’un des deux pêcheurs de Rhuys à vendre sa pêche aux particuliers, avec Mickaël Perrodo mouillant dans le nez du dragon, à Port Navalo.
Mais à Rhuys, la grande affaire de la mer, ce sont les huîtres. Cap à l’Est toute ! sur les conseils du chef de La Pergola, Patrick Dagorne. Le Tour du Parc, Pencadénic. Passés les marais salants, au bout de la route, l’histoire semble finie avec ces baraquements, abandonnés pour certains, défiants fièrement Damgan, si loin… Même pas la queue d’un chat ce matin ensoleillée. Là, un bassin où quelques paniers d’huîtres creuses s’affinent tranquillement. Pas un bruit. Brusquement, les robinets s’activent pour renouveler l’eau du bassin. Pencadénic n’est pas mort. Loin de là même, puisque Rhuys est un concentré de l’activité ostréicole à elle-seule ! On y croise aussi bien des ostréiculteurs traditionnels, des ostréiculteurs tout court, une écloserie… 46 exploitations au total, dont la famille Le Floch, qui a posé son chantier tout au bout de la route, à gauche en montant. « Embarquez donc, on a des poches à retourner en mer. » Oh la belle aubaine ! Direction le pont de Banastère. De ce côté, les Le Floch disposent de parcs « tous remplis pour les fêtes. Environ 3500 poches de 200 huîtres chacune. » Les naissains grandissent côté Golfe, « ça pousse bien du côté du Logeo, Godec, Stibiden, pointe de Bernon. »
Cette presqu’île est un havre de gourmandise. Pas envie d’en sortir… De toutes façons, demain il faut encore goûter le Paris-St Gildas, praliné amande noisette, de la Petite Biscuiterie, la P’tite Mam, bière artisanale de la Brasserie de Rhuys et le saumon fumé d’Arzon de Patrick Chauchard, encore un bon producteur de l’association Produits en Rhuys (avec Les Viviers de Banastère, La Maison du Cidre, La Ferme de Suscinio et la Biscuiterie des Vénètes)…
Merci c’est magnifique !
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